Conseils de lecture
Une comédie humaine drôle et touchante
Ce n'est pas de sa faute si Boulette a toujours faim. Entre Grosse Dame qui l'élève aux gnocchis bechamel et sa mère qui la gave de Royal Plouc Chicken lors des visites autorisées par la Tour des enfants perdus, Boulette ne cesse de se remplir. Elle mange de tout et tout le temps, voit son corps enfler et changer et observe ce phénomène avec un étrange détachement. Car pourquoi ingurgite-t-elle autant de nourriture en toutes circonstances ? Pour oublier le joyeux foutoir de sa famille d'accueil et les visites de la dame de l'assistance ? Fermer les yeux sur les lettres sans queue ni tête de sa mère dérangée qui exige que le juge des mioches lui restitue la garde de son enfant ? Ne pas penser la façon dont les autres la regardent et la traitent à l'école ? En attendant de savoir ce qu'elle veut vraiment et de découvrir qui elle est, Boulette se laisse trimballer et gaver et contemple le monde et les êtres le plus silencieusement du monde, aussi immobile qu'un objet. Entre deux crises de boulimie nocturne et quelques missives absurdes de sa mère folle, Boulette parviendra-t-elle a s'affirmer enfin et à trouver sa place dans ce monde dérangeant et dérangé ?
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Joëlle Varenne nous propose une joyeuse et tonitruante comédie humaine, à la manière d'une fable sociale suintant d'une poésie aussi savoureuse que potache. Menée par une brochette d'antihéros tendres et hilarants, cette histoire conte le quotidien d'une gosse paumée parmi les paumés, en quête d'amour et d'identité. Pas facile, quand on s'appelle Boulette et qu'on est étouffée par l'amour excessif d'une grosse dame envahissante et intrusive, par celui déraisonné d'une mère cinglée et par celui, obscène et étrange, d'un oncle qui sent l'anisette. C'est en tous cas avec beaucoup de joie et de tendresse que l'on suit les aventures de Boulette dans ce récit d'apprentissage qui prendrait presque des airs de vaudeville s'il n'était pas autant frappé de justesse, de tendresse et de révolte à tous les étages. Un roman humain et attachant comme on les aime.
Le Premier Chat dans l'espace a mangé de la pizza
Dessins de Shawn Harris
Traduit par Philippe Touboul
De Mac Barnett
Albin Michel
Une aventure spatiale drôle et WTF !
À la suite de diverses perturbations et phénomènes étranges, les scientifiques sont formels : la lune est en danger ! Et ce danger n'est pas des moindres : une colonie de rats machiavéliques s'acharne à grignoter la lune dont il ne restera bientôt plus rien ! On décide donc d'organiser une mission spéciale afin de venir à bout des rats en envoyant celui qui sera le dernier espoir de la Terre : le premier chat de l'espace.
Le premier chat de l'espace voudrait bien manger de la pizza mais sa mission l'oblige à se concentrer sur ses objectifs et à trouver un moyen de mettre fin au plan des rats. Aidé par son fidèle robot coupe ongles et par la reine de la lune, il devra traverser des contrées mystérieuses et rencontrer les êtres drôles, étranges ou inquiétants qui les peuplent, afin de déjouer les plans de dévastation des rats....
Une aventure spatiale drôle, totalement WTF et définitivement géniale qui n'est pas sans rappeler l'univers d' Adventure Time et qui fera rire et sourire petits et grands. On a adoré !
Une quête familiale
Frappées par la mort de leur mère à l'âge de 9 ans, Clara et Laura, sœurs jumelles, ont été élevées par leur oncle Jérémy, bercées par un amour inconditionnel. Le côté fantasque et insouciant de cet oncle au grand cœur, charmeur et protecteur leur a permis de surmonter ce deuil incommensurable et de devenir deux belles jeunes femmes aujourd'hui âgées de 22 ans.
Bien qu'ayant des caractères diamétralement opposés, Laura, la meneuse qui excelle en équipe de France de Handball, et Clara, réservée et raisonnable qui fait des études de paysagiste, partagent ce lien indéfectible qui définit si bien les jumeaux : elles sont deux mais ne font qu'une et partagent tout.
Lorsque Laura apprend être frappée par une leucémie, le trio se retrouve de nouveau ébranlé par ce nouveau coup dur de la vie, surtout quand les tests réalisés confirment que Clara et leur oncle sont incompatibles pour un don de moelle osseuse.
Prête à tout pour sauver sa sœur, Clara envisage l'impensable : retrouver la trace de leur père biologique qu'elles n'ont jamais connu, dernier espoir de guérison pour Laura.
Fouillant dans les papiers de sa mère décédée, Clara va trouver une photo qui pourrait tout changer sur laquelle elle reconnaît sa mère l'année précédent leur naissance accompagnée d'une femme et de trois hommes. Et si l'un d'entre eux était leur père ?
Commence alors une course contre la montre qui conduira la jeune femme en Italie et en Sardaigne. Mais remuer le passé n'est pas sans risque et les secrets qui refont surface pourraient bien changer à jamais leur vie.
Coup de cœur pour ce nouveau roman de Laurent Lagarde qui nous avait déjà conquises avec “ Troisième jeunesse” largement plébiscité par nos lecteurs.
À la fois roman d'apprentissage, drame familiale, “les cinq sur la photo” est un récit aux personnages attachants qui vous fera passer du rire aux larmes et dont l'intrigue et les rebondissements vous tiendront en haleine jusqu'aux dernières pages.
Une héroïne mystique dans une Amérique exsangue
Dans une ville industrielle sinistrée, Blandine occupe un logement social dans un immeuble où s'entassent adolescents issus de foyers d'accueil, célibataires discrets, jeunes parents et retraités aux revenus modestes. Avec ses cheveux blancs, son visage singulier et son air éthéré, elle exerce une étrange fascination sur ses trois colocataires - auxquels elle ne porte aucun intérêt - qui lui vouent une admiration proche du culte. Dotée d'une grande intelligence, la jeune fille, aussi taciturne qu'insondable, est fascinée par les femmes mystiques : elle lit en boucle les écrits de Thérèse d'Avilla et des grandes mystiques et nourrit une obsession pour Hildegarde de Bingen, à laquelle elle ne cesse de se référer. Puisant sa force dans les saintes écritures et dans le mysticisme, Blandine ignore qu'elle s'apprête à sortir de son corps et cette histoire, si nous l'écoutons jusqu'à la fin, nous dira comment cela est arrivé...
À seulement 30 ans, Tess Gunty nous livre un premier roman exigent, d'une grande intelligence, qui parle de l'insupportable solitude mais aussi des liens invisibles qui nous unissent. A travers une galerie de personnages perdus et excentriques, l'autrice évoque une Amérique exsangue et rongée par les désillusions, qui vogue entre révolte et lâcher prise. Le récit prend des allures de roman chorale et l'autrice jongle avec les codes et les styles pour nous offrir un texte semblable à nul autre, où les êtres s'ignorent, se frôlent ou s'entrecroisent et où les destins parfois s'unissent, de la façon la plus inattendue qui soit. Dans cette galerie de personnages démunis, il y a une jeune mère qui n'ose affronter le regard de son bébé, une vieille fille solitaire, modératrice sur un site nécrologique, une star hollywoodienne narcissique en fin de vie, et un homme convaincu d'être atteint des Morgellons, dont le passe temps favori consiste à s'enduire le corps de peinture fluorescente. Chacun d'entre eux porte une douleur et une solitude incommensurable, cherche à trouver sa place dans un monde injuste, parfois brutal, qui les asphyxie et puis au cœur de cette ribambelle humaine gravite Blandine, sorte d'astre mystérieux souffrant d'une incarnation trop lourde, qui vomit le système tout entier et rêve d'expériences mystiques. Dans cette grande fable contemporaine, l'autrice nous propose des portraits d'hommes et de femmes confrontés à eux-mêmes et nous conte les travers d'une époque aux maux innombrables nous proposant un véritable voyage, une expérience littéraire tout à fait inouïe aux confins de l'âme humaine.
De femme ordinaire à mère infaticide
2017. Midori Yamada est inculpée pour infanticide après la découverte des corps de ses enfants. Qu'est-ce qui a pu pousser cette jeune mère célibataire à commettre un acte aussi atroce ? Comment en est-elle venue à se sentir démunie au point de tuer ses propres enfants ?
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Une journaliste française, en poste au Japon, décide de s'intéresser de près à cette affaire et, plus que tout, de comprendre comment une jeune fille ordinaire de la région de Fukushima a fini par se perdre en ville, se prostituer pour gagner sa vie et négliger ses enfants avant d'en finir définitivement avec eux. Au-delà du crime, la journaliste, devenue enquêtrice, s'interroge sur le Japon et son système judiciaire, sur le silence de tout un système face aux femmes démunies et essaye de comprendre comment une jeune femme ordinaire, terrassée par le désespoir, en vient à commettre l'irréparable.
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Comme son héroïne, l'autrice, Karyn Nishimura, est journaliste au Japon, correspondante pour un journal français. Dans l'affaire Midori, tout est fictif mais tout est inspiré de faits réels. S'inspirant de faits divers similaires, elle imagine le personnage de Midori, jeune femme terrassée par l'expérience du tsunami de Fukushima, brisée par les réseaux urbains mafieux et finalement complètement abandonnée par un système qui ignore trop souvent le douloureux quotidien des mères isolées. À travers cette histoire de mère infanticide, c'est tout le système japonais et ses traditions qui sont passées au crible au cours d'un cheminement aussi intelligent que captivant.